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Déclaration du Greffier, M. Adama Dieng, sur les allégations de partage d’honoraires entre un détenu du TPIR et son Conseil de la Défense

Historique

En l’affaire Le Procureur c. Joseph Nzirorera, la Chambre de première instance II, dans sa Décision du 3 octobre 2001* relative à la Requête de Nzirorera en retrait de Conseil commis d’office, a rejeté par deux voix contre une ladite requête. [Le Conseil principal de l’Accusé Joseph Nzirorera avait été commis d’office par le Greffier conformément au programme d’assistance juridique du Tribunal, M. Nzirorera ayant déclaré qu’il ne pouvait assumer les coûts de sa défense.]

Dans sa Décision, prise à la majorité (juges William Sekule et Arlette Ramaroson), la Chambre de première instance a chargé le Greffier d’examiner la question du partage d’honoraires, y compris les allégations formulées en l’espèce, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour informer tous les Accusés comparaissant devant le Tribunal et leurs conseils que le partage d’honoraires était une pratique inacceptable et devait être sanctionnée conformément au Règlement. Le Juge Winston Churchill Matanzima Maqutu a joint à cette une opinion individuelle*.

Dans la requête, l’Accusé Joseph Nzirorera a demandé à la Chambre de retirer la commission d’office de son conseil principal, Me Andrew McCartan (Royaume-Uni), et de son coconseil, Me Martin Bauwens (Belgique), en faisant valoir, entre autres, que la confiance qui devait exister entre l’accusé et son conseil n’existait plus, qu’il y avait « un désaccord profond et irréconciliable » entre l’Accusé et ses conseils concernant la stratégie de défense, et que le Conseil principal avait agi malhonnêtement et au mépris des intérêts de son client et de ceux du Tribunal, notamment en demandant à l’assistante juridique de falsifier le montant de ses honoraires pour maximiser ses gains.

Me McCartan a contesté les allégations de M. Nzirorera. Dans une lettre adressée au Greffier, datée du 11 avril 2001, il affirme que la requête de l’Accusé visant à obtenir le retrait de Me McCartan comme Conseil principal est en réalité motivée par le fait que celui-ci a refusé, comme M. Nzirorera le lui avait proposé, de partager les honoraires versés par le Tribunal au Conseil principal.

La majorité de la Chambre a estimé que l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant le retrait de conseils n’avait pas été établie, mais elle a affirmé que l’allégation de malversations formulée contre Me McCartan était une accusation grave qui appelait l’ouverture d’une enquête. La majorité de la Chambre a souscrit à l’assertion de Me McCartan selon laquelle son refus de conclure un accord prévoyant le partage des honoraires comme l’Accusé le lui demandait ne constituait pas une circonstance exceptionnelle.

Dans son opinion dissidente, le juge Maqutu estime, entre autres, que Me McCartan a conclu un accord de partage d’honoraires avec l’Accusé en novembre 2000, qu’il n’a pas signalé cet accord en temps opportun et ne l’a fait que quand il a su que l’Accusé était sur le point de demander son retrait en tant que Conseil. Ce faisant, Me McCartan avait perdu sa « haute position morale ». Selon le juge Maqutu, l’Accusé n’avait pas reçu copie de cette lettre [adressée au Greffier] du 11 avril 2001, comme il y avait droit. On avait de la peine à suivre un praticien du droit lorsqu’il affirmait avoir cru que le Règlement du Tribunal autorisait la pratique, manifestement immorale, du partage d’honoraires. Le juge Maqutu a également rappelé que Me McCartan avait reconnu, en réponse à une question posée par les juges, que le partage d’honoraires était une pratique interdite et considérée comme contraire à l’éthique par le Code de déontologie de la Law Society of Scotland à laquelle il appartenait.

Déclaration

L’Accusé Nzirorera a déposé un Acte d’appel contre la Décision de la majorité de la Chambre de première instance II. Le Greffier ne peut donc faire aucun commentaire sur les questions substantielles de fait ou de droit qui sont sub judice en l’espèce.

Toutefois, le Greffier tient à souligner, comme il l’a fait dans ses déclarations antérieures des 13 juin et 16 juillet 2001 sur les questions relatives à la Défense au sein de ce Tribunal, qu’il entend prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher tout abus du système d’assistance juridique du Tribunal. Dans ce contexte, plusieurs des initiatives et des réformes systématiques annoncées dans lesdites déclarations ont été entreprises et sont en cours.

Conformément à la Décision de la majorité de la Chambre en l’affaire Nzirorera, le Greffier a décidé d’autres mesures afin d’assurer qu’une enquête effective soit menée sur les allégations d’indélicatesse formulées contre le Conseil principal et les allégations de partage d’honoraires entre les accusés et les conseils de la Défense rémunérés par le Tribunal. Le Greffier a pris les mesures supplémentaires suivantes à ce sujet :

  • Mise en route d’enquêtes supplémentaires et assistance à cet effet, y compris la communication aux parties concernées dans l’affaire Nzirorera des informations pertinentes additionnelles qu’elles demandent;
  • Proposition d’un amendement à apporter au Code de déontologie à l’intention des conseils de la Défense du TPIR, visant à interdire expressément le partage d’honoraires et imposant aux conseils d’informer le Greffier de toute violation alléguée de cet article par un autre conseil ou par un membre de l’équipe de la Défense. Cette proposition d’amendement sera examinée lors de la prochaine session plénière des juges du Tribunal.

Le Greffier redit à l’intention de tous les accusés comparaissant devant ce Tribunal et de leurs conseils que le partage d’honoraires est inacceptable et sera réprimé en vertu du Règlement et de toute autre réglementation pertinente, chaque fois que l’existence d’une telle pratique aura été établie.

Le Greffier restera vigilant dans l’administration du programme d’assistance juridique du Tribunal afin de garantir l’application d’un code de déontologie très strict dans la défense des accusés comparaissant devant le Tribunal. Dans cet ordre d’idées, le Tribunal a proposé dans son projet de budget pour l’exercice biennal 2002-2003, la création d’un poste d’enquêteur pour les affaires concernant la Défense; il est convaincu que cette proposition, si elle devait être approuvée par l’Assemblée générale, renforcera considérablement la capacité du Tribunal de réaliser cet objectif.

-------------------------------------------------------------------------------- * uniquement en anglais

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